Wombat

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Hélène Boccandé

Hélène en tenue de travail. Crédit photo : Naval Group

Hélène se destinait à devenir infirmière. Elle est devenue soudeuse sur les composants de la chaufferie nucléaire des sous-marins chez Naval Group. Deux mondes qui ne se ressemblent, mais alors, pas du tout ! Sauf que dans les deux cas il faut être perfectionniste et qu’il faut avoir le sens de la minutie ainsi que du travail très bien fait car la vie des gens en dépend. Comment en est-elle arrivée à faire ce métier difficile où les femmes se font extrêmement rares, mais dans lequel elle s’épanouie complètement ?

« En fait, après mon BEP (brevet d’études professionnelles) sanitaire et social j’ai entamé un bac professionnel, mais je ne l’ai pas eu », me raconte cette jeune femme au franc parler. Ne souhaitant pas poursuivre ses études elle enchaîne les petits boulots près de chez elle à La Baule, « se cherchant », quand une amie lui signale que le constructeur de navires, Chantiers de l’Atlantique, à Saint Nazaire, recrute.

« J’y suis partie avec ma sœur et j’ai été engagée par une boîte d’intérim qui a payé ma formation et mon stage c’est très bien passé. » Elle monte et soude des petites pièces sur les échafaudages qui entourent un navire lors de sa construction et fait aussi de la maintenance. « L’ambiance et l’environnement m’ont beaucoup plus et le fait de travailler qu’avec des hommes aussi », raconte-t-elle.

Hélène poursuit : « La soudure est un travail minutieux. Quand on l’a bien faite on est vachement fière ! » Elle admet être « perfectionniste » et trouve que « quand la soudure est bien régulière, c’est propre, c’est lisse : c’est beau ! » Elle a commencé avec la soudure à l’arc ou soudage TIG (tungsten inerte gaz) « qui est plus fin, plus minutieux » que le soudage MIG (metal inert gas) et MAG (metal active gas) qu’elle n’a jamais pratiqué. « Je pense que les femmes son plus minutieuses et ont plus de dextérité que les hommes », dit-elle pour expliquer pourquoi elle trouve que les femmes ont toute leur place dans ce métier.

Hélène. Crédit photo : Naval Group

Néanmoins elle le déconseille à celles qui cherchent juste un gagne-pain. « Pour faire ce métier il faut avoir les yeux qui brillent d’enthousiasme. Ce n’est pas un environnement propre, il y beaucoup de fumée. Il ne faut pas être super féminine », lâche-t-elle, en expliquant qu’elle même à « un caractère fort, je ne me laisse pas faire et je sais m’imposer. Il faut se faire une place dans une profession traditionnellement ‘masculine’ et les conditions en chaudronnerie lourde ne sont certes pas un milieu pour des femmes perçues comme sensibles et délicates. » Hélène, du haut de son 1m60, n’est peut-être pas ‘sensible et délicate’ mais ce n’est pas non plus un garçon manqué avec ses cheveux blonds mi-longs, ses sourcils bien dessinés et son piercing doré à l’arcade sourcilière gauche !

Pour sa part elle dit s’être habituée « à ce milieu là », en ajoutant que, de toute façon « je m’adapte et je veux qu’on me considère comme un homme car ce sont mes compétences qui doivent être reconnues avant tout ». Ceci étant dit, elle reconnaît que ces cinq collègues masculins dans l ‘équipe de chaudronnerie « sont attentionnés » vis-à-vis d’elle.

Deux ans et demi après son arrivée aux Chantiers de l’Atlantique elle fut embauchée par Kelvion qui fabrique des échangeurs de chaleur. « Ce sont comme des gros radiateurs de voiture », explique-t-elle. Mais c’est du travail en série et au bout de 12 ans, en 2017, elle en avait « marre de faire la même chose. Je m’ennuyais et je n’apprenais plus rien ». Plusieurs de ces collègues ayant déjà quitté l’entreprise pour aller travailler chez Naval Group, Hélène décide de leur emboîter le pas.

Elle est admise à l’école de soudure du groupe et suit une formation de six semaines, car sur ces produits militaires « on ne peut pas faire de bêtises ! » La jeune femme est admise à l’examen de qualification et commence alors tout un apprentissage. Au début elle reconnaît que « ça a été compliqué » et qu’elle s’est sentie « complètement perdue » avec une impression de tout recommencer à zéro. « Il y a eu des doutes mais aujourd’hui je suis moi-même » ajoute-t-elle, sereine.

L’équipe travaille en 3 x 8, quatre jours par semaine, mais pour Hélène qui est célibataire et qui n’a pas d’enfants « et donc pas de contraintes » ce rythme fut juste une question d’organisation et une habitude à prendre. Aujourd’hui elle travaille sur les composants de la chaufferie nucléaire qui reste 50 mois en atelier pour être réalisée. « L’exigence c’est : zéro défauts », dit-elle. Travailler sur un produit militaire ne la perturbe absolument pas. « Les grandes pièces sont passionnantes. Ce ne sont pas des pots d’échappement ! Et puis, nous on ne voit pas la finalité. C’est la soudure en elle même qui m’intéresse, les mains, le gestuel. » Elle est néanmoins fière de travailler sur ce qu’elle considère être un produit « prestigieux ».

Hélène admet que dans la sphère privé « les gens sont très surpris et interpellés » par son métier.

Hélène en tenue complète, prête à souder. Crédit photo : Naval Group

Pour le pratiquer elle doit porter une épaisse veste en cuir et une cagoule de soudure ventilée. D’un haussement d’épaules elle concède que « on a chaud, c’est comme ça. Maintenant je m’y suis habituée ». Comme elle travaille sur du métal chauffé à 200ºC, elle ne reste qu’une heure à la fois à son poste. Puis elle s’arrête pour surveiller son binôme pendant une heure avant, de nouveau, reprendre la soudure.