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Brigadier-chef Anne-Laure

Anne-Laure. Crédit photo : Aspirant Morgane/Armée de terre

Anne-Laure est une femme prévoyante et organisée. Engagée dans l’armée en 2015, elle vient de signer un deuxième contrat de six ans, un an de plus que son contrat initiale. Jusqu’au début de cette année elle était la seule femme opérateur de tourelle dans le 1er régiment de chasseurs. Mais, sachant fort bien que l’intérieur d’un char Leclerc n’est pas praticable pour une femme enceinte, elle a demandé à la fin 2020 un poste plus en adéquation avec cette situation potentiel. Et elle a bien fait car le projet de son couple de fonder une famille est en passe de se réaliser. Bébé Jules devrait pointer le bout de son petit nez début novembre !

Engagée depuis 2015, l’uniforme de l’armée de terre n’est pas le premier qu’a essayé Anne-Laure. Elle a d’abord porté le bleu de la police lorsqu’elle fut adjoint de sécurité à Metz. « J’ai toujours voulu être soit dans la police, la gendarmerie ou l’armée », dit-elle. 

Avant de commencer sa carrière dans la police Anne-Laure a passé un bac ES (économie et sociale) dans une section sport-étude car elle est pongiste, ou, en d’autres termes, joueuse de tennis de table. Elle a participé aux championnats de France niveau lycée ainsi qu’à d’autres compétitions représentant son club de Metz. Elle a par la suite commencé un BTS en management « mais je n’étais pas trop portée vers les études et c’est au bout du premier trimestre que j’ai postulé à la police et avec le retour positif j’ai arrêté mes études ».

Mais « même si je me plaisais bien dans la police, le côté aventure me manquait ». Elle réussit alors les tests de sélection pour l’armée de terre « mais je suis restée à mon poste dans la police jusqu’à la veille de mon entrée dans l’armée », souligne-t-elle.

Elle choisit le 1er régiment de chasseurs car il est basé à Verdun, pas trop loin de chez elle, et « parce que c’est un régiment combattant toutes armes alors il y a un grand choix pour découvrir tous les postes possibles », affirme-t-elle. Très vite elle s’oriente vers pilote du véhicule blindé léger VBL et entreprend différentes missions en France. Elle rit gentiment quand je lui demande si piloter ce genre de véhicule ressemble à la conduite d’une voiture citadine. « Pas vraiment car il faut surtout faire attention à la surface sur laquelle on roule et y adapter sa conduite.» Et puis à la fin de la première année on lui propose de se former comme tireur sur le char Leclerc : c’est la personne responsable pour le canon. « C’est tout de suite très impressionnant et j’ai adoré ça » dit-elle enthousiaste, et ajoute que « servir sur le char Leclerc c’est une grande opportunité ».

Anne-Laure charge un obus dans un char Leclerc. Crédit photo : photo personnelle

Elle est la seule fille parmi la quinzaine de stagiaires issus de cinq régiments qui sont au camp de Canjuers pour suivre la formation de tireur de char. Ses co-stagiaires la chamaillent gentiment jusqu’à ce qu’elle fasse ses preuves et qu’ils se rendent compte à qui ils ont à faire. En effet, Anne-Laure termine première du stage ! « J’essaie toujours de faire deux fois plus pour montrer que j’en suis capable », dit-elle. « Quand on est une fille dans ce milieux il faut en vouloir, il ne faut pas se laisser marcher sur les pieds, il faut foncer et ne pas s’arrêter au regard des autres », conseille-t-elle.

L’équipe d’un char est constitué de trois personnes : le pilote, le chef de char et le tireur. Tous ont « juste la place de s’asseoir » sauf que le tireur, ou la tireuse dans ce cas, est assise dans la partie tourelle qui tourne. « Imaginez un véhicule avec au centre un pot de yaourt qui tourne. Et bien moi je suis assise en bas du pot de yaourt », rit-elle. Elle ajoute qu’ils sont toujours deux dans le char « à la recherche des objectifs » mais c’est principalement elle qui tire. Ce mouvement perpétuel en rendrait plus qu’un malade. Par chance, Anne-Laure n’est « pas malade dans le char ».

Ses journées ne se passait pas toutes à l’intérieur du char ! « Il y a beaucoup de formation continue sur les chars. On doit savoir résoudre les pannes et changer les chenilles, et puis il y a beaucoup de préparation avant et après une sortie : il faut aider nos camarades à nettoyer le char et après le tir il faut toujours que le tireur nettoie le canon. » Avec quoi ? « Et bien, ça ressemble à un gros coton-tige ! » s’esclaffe-t-elle.

Anne-Laure assise sur un char aux EAU. Crédit photo : photo personnelle


Elle garde un bon souvenir de ses trois déploiements de quatre mois chacun : deux aux Émirats Arabes Unis, qui a aussi des chars Leclerc, et un en Côte d’Ivoire, où il n’y en a pas, alors elle était en VBL.

Mais « faire du char et être enceinte ce n’est pas compatible » alors en prévision de fonder une famille elle demande une mutation à un poste de bureau. « J’ai eu de la chance car on m’a fait plusieurs propositions et aujourd’hui je suis au Bureau opérations et instructions du régiment ce qui revient à mes études BAC ES et début BTS car je fais de la gestion du budget » raconte-t-elle.

Très différent comme métier que celui de tireur, elle se plait néanmoins et pense rester « là où je suis » après la naissance de son fils. 

Éventuellement elle deviendra sous-officier, car on lui a déjà proposé de suivre la formation, mais ce ne sera pas avant que son fils soit sevré.