Marie-Solange Milleron
Marie-Solange est la directrice du secteur terre et naval au sein d’Optronique et Electronique de Missiles chez Thales. La jeune femme de 37 ans a été nommée à ce poste en septembre 2021, se retrouvant à la tête d’une équipe, qui, mis à part une autre jeune femme, est constituée exclusivement d’hommes de plus de 50 ans qui « ont des filles de mon âge ! » Elle sourit. « C’est ma jeunesse qui les a surpris plutôt que le fait d’être une femme », analyse-t-elle.
Ingénieure électronique, son parcours est atypique même si elle dit n’avoir que suivi les pas de son père et de son frère, ingénieurs. Le début est somme toute assez classique : Bac S, prépa, Supélec (depuis 2015 CentralSupélec). C’est en dernière année que son parcours diverge : elle saute sur l’occasion qui lui est offerte de postuler à la Georgia Institute of Technology (plus communément nommé Georgia Tech) à Atlanta dans l’état de Géorgie aux États-Unis. Une université de 16 000 étudiants comparée à moins de 2 000 pour Supélec. Et puis Atlanta ce n’est pas Gif-sur-Yvette !! « J’ai toujours voulu aller aux USA mais c’est vrai que cela a été très difficile. Pendant six mois je n’arrivais pas à prendre de notes », rit-elle. Mais le résultat c’est qu’aujourd’hui elle parle couramment anglais, avec un accent américain bien sûr !
Avec son MS (Master of Science) en poche en 2006, elle décide de rester aux USA, quittant la Géorgie pour la Californie où elle a décroché un poste chez Qualcomm à San Diego « où, en gros, je ‘designais’ des puces » tout en maintenant une relation à distance avec son fiancé rencontré à Supélec qui, lui, est resté en France.
Mais Benjamin, ingénieur dans l’ industrie pétrolière, la rejoint en 2010 quand elle change d’employeur et de lieu de travail, troquant Qualcomm pour Texas Instruments et la douceur de vivre d’une ville de bord de mer en Californie pour une autre dans le plat pays texan : Dallas. Elle n’en dit pas grand-chose mais son visage en dit long ! Le Texas ne convient pas au couple en dépit d’une belle maison en brique dans une zone résidentielle verdoyante. En sus, son employeur ne lui laissant que peu d’opportunités pour évoluer vers le côté business, probablement car elle montre de brillants résultats techniques avec deux brevets publiés, le couple jette l’éponge au bout de deux ans et demi pour s’installer à Londres où Marie-Solange entreprend un MBA au London Business School.
Elle a ensuite travaillé pendant trois ans pour McKinsey mais elle se réoriente rapidement « et j’ai passé 50 % de mon temps à m’occuper de la transformation digitale ».
C’est en 2018 qu’elle fut contactée par un chasseur de tête qui cherchait un directeur de cabinet pour Patrice Caine, le PDG de Thales. « Curieuse de voir » elle trouve chez Caine un vrai désir d’embaucher plus de femmes ainsi qu’une « personne très humaine pour qui concilier une vie de famille et la vie professionnelle est très important ! ».
Alors pendant trois ans elle est la directrice du CEO office de Caine, préparant ses rendez-vous, rédigeant ses speechs et découvrant le groupe Thales dans toute sa complexité, à travers sa dualité civile/militaire et ses divisions différentes (aéronautique civile et militaire, défense terrestre et navale, sécurité, espace et transport). Elle prend Caine au mot et un petit frère se joint à sa fille de quatre ans lui permettant de prendre « un congé maternité qui s’est très bien passé ».
Puis, quand Thales lui propose son poste actuel à la suite, elle réfléchit à ce qui compte pour elle dans son travail « car j’ai besoin de sens. Je me suis rendu compte que pour moi, travailler dans le secteur de la défense c’est apporter mes compétences pour mon pays ».
Marie-Solange concède que certains de ses amis « se questionnent » à propos de son métier dans la défense mais pour elle son travail contribue à « permettre à mon pays d’être souverain ». Elle appelle de ses vœux que plus de gens se mettent « au service de notre pays ».
La jeune femme dit n’avoir pas subi de remarques déplacées en dépit de la surprise suscitée par sa jeunesse dans son poste actuel. « Les équipes veulent un chef qui décide », déclare-t-elle. Son travail a été récompensé par la remarque d’un de ses collègues qui lui avoue admirer « énormément » sa « motivation ».
Une motivation qui vaut aussi pour elle-même. En dépit de la présence d’une nounou et d’un mari qui « fait tous les repas » et qui partage les tâches ménagères à 50 %, « il faut être très, très organisée », souligne-t-elle pour que les deux membres du couple puissent mener de front des carrières intéressantes et une vie de famille.